Ploc!

Ploc!

Ploc!

Seul le bruit de l’eau tombant des ruines de ce qui avait été autrefois le corridor venait percer le silence de plomb qui s’était abattu dans le corridor. Respiration sifflante, le dos appuyé contre une section de plancher effondré, les iris bougeaient, cherchant à effacer le flou qui masquait sa vision. À moitié trempée, les cheveux sombres plaqué contre son visage où les gouttes d’eau venait se perdre contre sa peau, Marcus sentait un froid le saisir. Les paupières bataillant contre l’engourdissement, le corps arqué, la main droite plaqué contre son côté, les lèvres minces se serraient pour ne pas se laisser aller à la douleur qui paralysait ses pensées.

Ce n’était pas le moment.

Pas encore.

Le jeune homme se sentait maudit. À croire qu’un mauvais sort lui collait à la peau. Était-ce un effet du brouillard qui le rendait si incompétent? Jamais sa magie avait été si hors de contrôle. Même sa baguette montrait des signes d’agressivités lui qui l’avait toujours bien maitrisé. À croire qu’elle faisait le contraire de ce qu’il demandait, sauf lorsque venait le temps de sauver les autres. La main gauche serrée sur le bois d’acacia, Graystone attendait l’apparition certaine de la femme aux cheveux roux. Son sortilège avait fonctionné sur elle, ralentissant sa chute. Elle avait du mieux s’en sortir que lui. Un rictus mauvais étira ses lèvres, sa main s’appuyant sur sa blessure pour s’assurer que l’hémorragie ne se répendait pas. Il était destiné a jouer les héros, ou mourir aussi stupidement que l’un deux.

Les iris aux îles des mers profitèrent du silence pour observer l’endroit où ils avaient atterri. Les murs de pierres taillés le laissaient perplexe. Il s’agissait d’une intervention humaine. Ou plutôt une intervention magique. Le regard tourné vers le tunnel sombre qui s’enfonçait sous l’hôtel de ville, Marcus sentit un frisson traversé sa paume posée contre la pierre. Une sorte de pulsation semblait émaner du trou, comme si quelque chose s’agitait dans les ténèbres. Avaient-ils trouvé la source? Fouillant dans la poche sur sa cuisse, l’apprenti auror puisa dans ses ressources pour envoyer un message à l’équipe.

Bref, concis, il n’avait pas l’énergie pour faire de grandes phrases grandiloquentes. Le regard de Graystone suivit l’oiseau de papier s’envoler hors du fossé qu’il avait creusé. Si c’était la source, il allait devoir s’avancer dans le passage. Il y avait quelque chose de familier dans le trou noir qui s’enfonçait dans les ténèbres, une impression de déjà vue. Les pierres étaient recouvertes de symboles que les flammes bleues éclairaient de leur lueur vacillante, leur donnant un air sinistre. Graystone chercha à effacer la douleur lancinante qui brouillait ses pensées. Il avait déjà vue ces symboles quelque part. Mais où?

Un bruit de gravats attira l’attention du sorcier qui leva aussitôt sa baguette devant lui. La lueur d’un Lumos lui révéla rapidement la position de son adversaire et le jeune homme se redressa prêt à en découdre de nouveau. La potionniste surgit de derrière un amas de dalle, main en l’air en signe de paix. Les sourcils de Graystone se froncèrent devant ce qui pouvait être une ruse. La voix calme, douloureuse, la professeure… s’excusa. Le visage se teinta d’une stupeur passagère. Vraiment? Les explications données, une lueur de compréhension mira dans les iris. Voilà comment il faisait, le satané brouillard envahissait les gens de l’intérieur. Mais pouvait-il faire confiance à la sorcière pour si peu? La baguette lança un avertissement d’étincelle lorsqu’elle fouilla dans les revers de son manteau d’un geste lent. Il se méfiait. Il avait déjà eu un aperçu du genre de fiole qu’elle cachait dans ses poches, malgré l’eau qui avait coulé sur son manteau, l’apprenti auror sentait encore le souffre. Mais la demoiselle ne semblait pas en mode offensif, heureusement pour lui. Elle s’était montrer une adversaire redoutable, et il n’était définitivement plus à la hauteur de l’affronter. Quel affront pour son orgueil. Lui, l’apprenti auror, se faire rembarrer par une potionniste. Potter allait l’entendre pour sur… s’il sortait vivant de ce tunnel…

L’oreille attentive aux explications, le regard passa d’une fiole à une autre. Pouvait-il lui faire confiance? Dans l’état où il était, il n’avait pas vraiment le choix. Un nouveau bruit venant d’en haut fit dévier l’attention de Marcus. Les premiers sons d’un sortilège moururent dans sa gorge lorsque son regard clair croisa celui de Ms Hicks qui dévalait le plafond en trombe, sautant énergiquement dans la cavité qu’ils avaient découvert. Un sourire de soulagement éclaira les traits durs de l’apprenti auror. Les équipes étaient là! Et très efficace. Le jeune homme ne put s’empêcher de faire une grimace éloquente lorsque la sorcière s’attaqua à la plaie qui ornait son front. Il ne disait pas non à un peu de soin. Malheureusement le soulagement fut de courte durée.

Une simple erreur d’inattention
Un simple relâchement

Les sens paralysés par la douleur, Graystone avait cru à une accalmie et ce fut suffisant pour que Ms Hicks subissent un sortilège à son tour. Comme s’il avait été réveillé par un plongeon dans l’eau glacée, l’apprenti auror se redressa, arrachant l’un des items de la main de la potionniste avant de transplanner devant l’entrée du tunnel qu’il observait depuis un moment. Il savait qu’il aurait dû se méfier! Ses entrainements lui permettaient au moins ça, le réflexe de réagir rapidement. Heureusement que Ms Hicks avait été transformer en canard, elle pouvait facilement se sortir de ce pétrin et vue sa taille, le sortilège n’allait pas durer longtemps!

S’enfonçant dans le couloir de ce qui semblait être un accès à une crypte, Marcus lança un Fumos derrière son dos, espérant que l’épaisse fumée serait un ralentisseur à ses assaillants. Les dents serrées, la main fermée sur un contenant serré contre son côté, il s’enfonça dans les ténèbres simplement perturbées par la lueur de son lumos. Il devait s’éloigner et vite. Le pas trainant, il atteignit ce qui semblait être un passage plus large au moment même où la douleur devint impossible. Se sentant fléchir, Graystone alla se dissimuler derrière une pierre imposante qui longeait le long d’un mur, se laissant choir au sol, à bout de souffle. Il n’en pouvait plus. Les iris claires se posèrent sur le flacon qu’il tenait à la main :

Résultat dé 2

Le petit flacon orange semblait briller dans la pénombre. La médecine moldus. Les sourcils se froncèrent, pouvait-il réellement faire confiance à cette médication? Au point où il était, il n’avait plus le choix. Il avala le contenu, probablement plus que nécessaire, les yeux se fermant, attendant que les effets se facent ressentir. Si la potionniste l’avait berné, il le saurait bien assez vite.

Résumé:

Le dos appuyé contre la pierre, les paupières fermées, l’apprenti auror attendait. Les secondes s’écoulaient sans qu’aucune douleur aiguë ne vienne surpasser celle qu’il ressentait déjà. Ce n’était donc pas un poison. Peut-être la professeure avait-elle dit la vérité? Pourtant il se méfiait de la médecine primitive des moldus, les petits comprimés ne lui disaient rien, mais devant une situation sans issus il lui fallait en venir aux extrêmes. Combien en avait-il avalé? Un? Deux? Dans son empressement il avait oublié de vérifier la dose. Ce serait bien le comble qu’il succombe comme un rat dans les sous-sols de l’hôtel de ville. Il y avait encore un canard à sauver, et des poumons à détruire et...

La douleur disparut.

Entre deux respirations saccadées, elle avait disparu, si brusquement qu’il ne s’en était même pas rendu compte. Marcus attendit un instant, bougeant lentement, persuadé que le moindre geste allait déclencher de nouveau le mal. Mais rien. L’euphorie de la libération lui permis enfin de respirer de tout son soûl, ricanant doucement dans l’obscurité. Voilà qu’il en était réduit à être sauvé par de la médecine moldue. Pouvait-il tomber encore plus bas? Il n’y avait aucun problème. Le canard allait tout régler. La petite medicomage ferait des miracles. Des bruits de pas dans le tunnel le forcèrent à se redresser péniblement contre son support, les pupilles contractés tentant de percer les ombres pour voir… se dessiner la silhouette de Taylor. Un sourire sincèrement soulagé étira les traits fatigués de Graystone qui fronça les sourcils à l’attitude pressés de l’agent. Il repartait? Ne valait-il pas mieux rester ensemble? L’apprenti auror tenta de dire quelque chose, mais les mots se bousculèrent dans son esprit sans qu’il ne réussisse à formuler correctement sa pensée. De toute façon il aurait parlé à une cape flottante puisque Taylor avait déjà disparu. Barnabas arriva à son tour pour s’enquérir de son état. Au prix d’un effort Marcus réussi à lui faire comprendre qu’il allait bien. Tout allait bien. Il fallait rattraper Taylor, il n’était pas prudent de s’aventurer si loin seul. Graystone avait bien payé le prix de sa propre témérité. Ne sentant plus la douleur, le jeune homme suivi Barnabas, cherchant à le rattraper sans comprendre pourquoi son corps ne suivait pas le rythme. Il arriva bien après le crime, ses yeux se posant sans comprendre sur le corps de Taylor. Un maléfice de saucisson? Pourquoi le chef se battait-il avec un autre? Marcus passa une main contre son visage pour en chasser la sueur et chercher à effacer le brouillard qui envahissait ses pensées.

Concentration Graystone, ce n’était pas le temps de flancher. L’euphorie provoquée par les médicaments et l’adrénaline de la situation avait au moins cet effet de l’annihiler temporairement face aux horreurs qui se dévoilaient sous ses yeux. Des corps disposés en cercles, dernières victimes du mal, la peau recouverte de symboles et de signes occultes. Leur pentacle dessiné par un liquide carmin dégageait une odeur putride de mort. Au-dessus flottaient deux masses sombres qui pulsaient faiblement. Les poumons. Devant ce décor d’outre-tombe, Marcus avait une désagréable impression de déjà vue. Il avait déjà vu ces symboles, ces dessins. Pourquoi n’arrivait-il pas à mettre le doigt sur ce souvenir? Le bruit de l’inspecteur qui passait à tabac le dernier cultiste était une source de dérangement des plus probantes, mais l’ordre qu’il cria fut plus que clair.

Ils devaient détruire. Tout détruire.

Une image d’un intense brasier se dévoila au regard de l’apprenti auror. Le feu pouvait venir à bout de ce cauchemar. Mais comment faire éclater un feu? Nouveau souvenir d’un rêve fugace, les flammes prenant la forme d’un élégant chat qui sautillait de ses pattes tendres, toucher de braise qui enflammait derrière lui la trace de ses sautillements. Un bombarda prononcer non loin de lui ramena son esprit à la situation, lui faisant cligner des yeux comme un endormi qu’on réveillait brusquement. Non d’un dragon Graystone! Le visage se tourna vers la jeune femme rousse qui était apparue comme par enchantement à côté de lui, observant à son tour l’amas de magie noire qui flottait au milieu du pentacle brisé. Détruire la crypte? L’idée était intéressante. Mais que feraient-ils des corps? Il fallait ramener Taylor aussi. Concentration. Sa remarque le fit tiquer. De la magie noire? Elle avait prononcé cette phrase à voix haute? Marcus se retourna franchement vers la femme rousse, son visage perdant le peu de couleur qu’il lui restait. Mais il la reconnaissait! C’était la professeur de potion qu’il n’avait pas été capable de mettre hors d’état! Les sourcils se froncèrent. Pouvait-il lui faire confiance? Ils n’avaient pas trop le choix. Et puis, il savait qu’elle avait raison. Un feudeymon aurait tôt fait de détruire cette abomination. Il était certain de cette réussite, mais le prix à payer était trop flagrant. Son regard chercha alors celui de Barnabas. C’était lui le chef, il devait bien dire que ce n’était pas une raison suffisante pour utiliser la magie noire. Ou peut-être que oui? Il ne savait plus.

L’esprit fut ramené sur du concret. Le bois d’acacia fut levé devant lui, expiration longue histoire de s’assurer de sa concentration sur son sortilège. La main droite posée en un réflexe sur son côté sanguinolent, il alla fouiller dans ses souvenirs, cherchant l’émotion qui convenait pour le sortilège. Car Marcus avait compris il y a longtemps que ce n’était pas le souvenir qui créait le patronus, mais l’émotion, ce bonheur indescriptible, cette joie pure que filtrait la magie. Le temps fut long, mais il trouva finalement la force nécessaire. La fin de ses études, lorsqu’il était parti pour son premier stage, les pieds atterrissant dans la neige de Russie. Ce sentiment de liberté qui l’avait étreint, comme un éclat de soleil perçant un orage d’été, une euphorie indescriptible. La baguette vibra sa voix grave résonnant pour ce sortilège qui demandait une grande maîtrise. Pas d’informulée cette fois, il avait besoin de la parole pour invoquer son sortilège.

La forme argentée surgit de la baguette, l’Orion se dressant devant ses mirettes. Les oreilles dressées, le grand chien foula l’air de ses pattes magiques, tournoyant autour du sorcier avant de se lancer à l’attaque sa gueule se refermant sur l’une de ses monstruosités noires, secouant la tête comme pour la déchiqueter.

Ce ne serait pas suffisant. Il en faudrait plus, beaucoup plus.

Résumé: