• ◊ Mensurations : 1 mètre 90, pour 80 kilos.
• ◊ Morphologie : Lukas a une longue silhouette élancée. Si ses épaules sont plutôt carrées, il n’est pas très musclé, puisque limité dans ses mouvements.
• ◊ Démarche et attitude : Il se tient toujours droit et digne, sans être rigide. Il boîte à cause d'une blessure causée par la magie noire, malheureusement incurable. Il s’aide d’une canne pour marcher.
• ◊ Droitier ou gaucher : Droitier.
• ◊ Manie : Il vérifie souvent que sa flasque de potion se trouve bien dans la poche intérieure de sa veste. Il ferme les yeux pour réfléchir.
◊ Couleur des cheveux : Noir corbeau.
• ◊ Longueur et type des cheveux : Courts et raides, pas souvent aussi bien coiffés que son statut social l’exige.
• ◊ Couleur des yeux : Bleu sombre, comme lorsque la nuit tombe.
• ◊ Forme du nez : Long et droit.
• ◊ Voix : Un timbre grave et profond, qui semble venir des tréfonds de son âme.
• ◊ Particularité : La canne de Lukas est en ébène, ornée d’un pommeau d'argent à tête de lynx. Il a aussi toujours l’air très concentré, car la douleur de sa blessure ne le quitte jamais.

Personne ne savait ce que faisaient vraiment les Rainforth. Nombreux savaient cette famille historiquement très habile pour les sortilèges et enchantements de l’esprit, très peu soupçonnaient ne serait-ce que la raison pour laquelle cette remarquable dextérité leur valait un poste de choix auprès du Ministère, de génération en génération. Était-ce si raisonnable d’en toujours faire des Oubliators ? La remarquable stabilité du statut familial n’était-il pas en lien avec ces vertigineux talents magiques ?

Des jacassements de couloir qui n’avaient intéressé les chefs de famille qui s’étaient succédé à un seul et unique moment de leur existence : celui où leur héritier commençait à se poser des questions. Quelle ne fut pas la surprise de Magnus Rainforth, lorsque son garçon, à peine âgé de sept ans, se planta un jour devant lui pour le questionner sur les inquiétudes que les bouches peu discrètes des adultes avaient fait parvenir à ses oreilles. Son fils, Lukas, un petit peu trop grand pour son âge et d’une sensibilité folle, qui l’avait fait pleurer la mort de leur vieil elfe une semaine auparavant. Magnus ne s’était pas attendu à l’entendre le questionner avant au moins onze ans. Oui, et quelle ne fut pas sa surprise, mais quelle ne fut pas sa fierté.
Lukas sut tout du rôle occulte que sa famille exerçait auprès du Ministère : des limiers, des hommes de l’ombre, libres d’employer tout moyen pour sauvegarder, préserver, protéger le Secret magique. Bien sûr le titre d’Oubliator avait cela de commode qu’ils avaient une fonction affichée, un titre officiel. Officieusement, ils étaient des sorciers bien plus dangereux que quiconque aurait pu le soupçonner. Naître parmi les Rainforth, c’était faire le serment, avant même de savoir parler, de ne jamais révéler cette vérité. Le petit garçon n’eut pas à promettre. Tout ce que disait son père avait force de loi.

Magnus était un homme à la droiture et l’intégrité profondes, qui lui valaient néanmoins une dureté de caractère qui heurtait souvent la sensibilité de son fils. Enfant, Lukas préférait de loin la compagnie de sa mère, Suzanne, aussi aimante et chaleureuse qu’elle était brillante sorcière. Quoiqu’à dire vrai, le temps ne changea rien aux préférences de Lukas. Une défiance proverbiale teintait les relations entretenues entre le père et le fils. Lukas se savait une perpétuelle source de déception pour son père, et Magnus ne se voyait autrement dans le regard de son fils que comme un patriarche froid et incompréhensif.

La première rentrée à Poudlard de Lukas fut le moment où il comprit que la pression paternelle qui pesait sur ses épaules le suivrait où qu’il aille tant qu’il n’était pas adulte. Les très solides acquis transmis par le précepteur qui l’avait suivi jusqu’à ses onze ans semblaient ne pas suffire à Magnus, qui pourtant avait tout orchestré de cet enseignement précoce. Une montagne de recommandations avait précédé sa montée dans le train, tout comme elles pleuvraient bientôt par courrier au fil de l’année, alors que ses résultats et progrès seraient surveillés de près. Oui, pour Lukas tout cela était tristement prévisible.
Contrairement à sa répartition au sein de la maison Serpentard. La Maison d’émeraude et d’argent, au reptile si digne, le toit des ambitieux, des fiers, des rusés. Où le Choixpeau avait-il vu que Lukas disposait de ces qualités, lui qui semblait un candidat tout choisi pour Poufsouffle, humble et endurant qu’il était ? C’était là, après ses questions de jeune enfant sur la destinée de leur famille, la deuxième grande surprise que Lukas avait réservé à son père, encore une fois sans s’en rendre compte.
Le parcours scolaire de Lukas fut parfaitement exemplaire. L’enfant farouche qu’il était se mua en adolescent secret, qui en disait peu sur lui mais se montrait aussi sympathique qu’il pouvait l’être avec les autres, bien qu’il s’ouvrît difficilement. Son appartenance à la noblesse sorcière lui permit de nouer des liens, et quelques amitiés, ce qui fut facilité par la pratique du Quidditch et ses performances au sein du club d’échecs version sorcier. Cependant quand le silence se faisait autour de Lukas, à nouveau seul, le poids de son devoir familial revenait lui peser sur la poitrine. Non, jamais il ne parvint à détourner son regard de cette pression ascendante, que des courriers réguliers lui rappelaient bien souvent malgré eux.

Suzanne mourut juste après la rentée de Lukas en troisième année. Elle avait été tuée à l’occasion d’une de ses missions de limier, à laquelle Magnus n’avait pu l’accompagner comme convenu au départ. La culpabilité lui rongea si bien l’âme qu’il érigea autour de lui un mur, d’autant plus infranchissable qu’il se retrouvait désormais en tête-à-tête avec son fils. Lukas, qui sembla le détester de tout son cœur, et dont l’œil si triste lui rappelait à quel point il avait été un époux et père défaillant. Une graine amère poussa au creux du ventre de Lukas, qui ne fut plus jamais le même à la suite de la perte brutale de sa maman. La famille plus éloignée, soucieuse des échos tristes de la Maison principale, se rapprocha dès lors du manoir.
C’est ainsi que chaque été, à compter de la disparition de Suzanne, que la tante Rosalynd et ses deux enfants, d’un an plus jeune que Lukas, vinrent passer les vacances au Manoir. Pour lui redonner un peu vie, disait-elle. Comme si qui que ce soit arrivait à la cheville de sa mère, songeait Lukas. L’honnêteté lui faisait dire, malgré tout, que la joie de vivre de sa tante avait de quoi alléger un peu leurs têtes alourdies par la tristesse, du moins le temps d’un de ses traits d’esprit, d’un souvenir heureux joliment raconté. La présence des cousins et de la tante calmait, en apparence, les ardeurs de la défiance exacerbée entre Magnus et son fils, mais tout cela n’était que poudre aux yeux.

Magnus perdit petit à petit de sa superbe d’autrefois. Le chagrin de la perte de son épouse l’amenuisât, le diminua, pour l’abandonner à une mélancolie qui fragilisa la confiance que le Ministère plaçait en lui. Rosalynd tenta par tous moyens de revigorer son frère, lui rappeler à son devoir séculaire, qu’il n’avait jusqu’à lors jamais perdu de vue. Rien n’y fit. Tout fut vain. Si vain. Bientôt, l’esprit de Magnus se brisa, le laissant prostré dans un fauteuil du salon, à contempler au-dessus de la cheminée l’immense portrait de Suzanne, qui lui souriait en silence.
Lukas ne put retenir son père parmi les vivants. Il vivait trop loin pendant trop longtemps, au cours de l’année, et il assumait parfaitement ne rien avoir fait pour réduire cette distance ne serait-ce que par une relation épistolaire. Aucune réponse ne lui parvenait jamais. De quoi bondir pour le fils, privé de sa mère par celui qui n’avait pas su la protéger convenablement. Magnus partit rejoindre sa femme tout juste après le diplôme de fin d’études de Lukas, qui à dix-sept ans, se retrouva à la tête des charges familiales.

Que n’auraient-elles été plus légères, s’il avait pu compter sur le soutien de Rosalynd. Celle qu’il croyait être sa chère tante Rosalynd, si elle n’avait nourri des ambitions si funestes et sinistres que jamais il n’aurait pu les imaginer, même touché par une folie passagère. Quelle naïveté. Mais qui se douterait que des velléités meurtrières pouvaient affecter une famille, dans la vraie vie, alors que ce genre de drame se lit dans les contes ?

Le sortilège de la mort frappa Lukas en plein dans le dos, un jour dont il ne se rappelait plus que cet événement. Elle s’était dite désolée, elle avait dit vouloir tirer son épingle du jeu, ne plus être mise de côté. Oui, elle avait certainement tout un tas de bonnes raisons de vouloir tuer son neveu. Si ce n’était qu’elle avait manqué de détermination. Sans quoi, bien sûr, Lukas ne serait plus là pour se souvenir, analyser, et comprendre que tout ce que sa tante lui infligea ce fameux jour était une blessure qui le mutilerait jusqu’à la fin de ses jours.

Après ce qui aurait pu être un sommeil de cent ans, Lukas se réveilla sur le sol d’une salle sombre. Au-dessus de lui, des inconnus aux yeux fous, qui en voulaient à son sang pur. A quoi bon se remémorer leurs motivations, tout ce que savait Lukas, c’était que son corps ne lui obéissait plus comme avant. Il ne sentait plus ses jambes. Sa baguette avait disparu. A moitié nu, il était à la merci de ceux qui voulaient expérimenter sur lui tout leur savoir magique. Le refaire marcher, en faire un pantin, ou que savait-il. Il avait eu mal. Diable, ce qu’il avait eu mal…
Mais dès l’instant où Lukas récupéra l’usage de ses jambes, qu’il fut à même de se lever, de faire plus de dix pas, il se trouva débarrassé de certaines pudeurs morales qui autrefois faisaient de lui un être humain digne de ce nom. Son corps avait été abîmé, partiellement réparé, mais son esprit ô combien affûté. Comme une lame de combat.
Il vola sa baguette à l’un de ses bourreaux. Il régla leur compte à tous ceux qui se mirent en travers de son chemin. Il fit ce que jamais il ne se serait cru capable de faire. Silencieusement, furtivement, précisément comme les Rainforth savaient séculairement le faire. Et par un miracle tout ce qu’il y avait de plus diabolique, Lukas retrouva le monde des vivants. La lumière. Son Angleterre natale. Plus déterminé que jamais à récupérer ce qu’on lui avait pris, en essayant de lui ôter la vie. Débarrassé de la baguette volée qui lui obéissait bien mal, somme toute, il trouva une remplaçante à l’ancienne qu’on avait depuis bien longtemps brisée. Une remplaçante au cœur battant d’un cheval maudit, noir comme le souffle de la Mort.

Il avait dix-huit ans. La graine amère qui avait germé autrefois dans le ventre de Lukas devint ronce. Une ronce tortueuse et empoisonnée, qui plus jamais ne quitta son corps, ni son regard, pour toujours assombri. Obsédé jusqu’aux prémices de la folie par l’idée de récupérer ce qui lui revenait de droit, Lukas, durant quatre ans, erra anonymement, enquêta, s’entoura de loyaux serviteurs prêts à lui offrir plus que leurs vies, pour lui assurer de solides arrières pour la reconquête de sa vie d’antan.
Brad Murray figurait parmi eux. Un colossal sorcier, qui injuria Lukas à leur premier contact, pour lui servir à peine deux heures plus tard du « votre grandeur ». Si Azkaban lui avait durci l’âme comme le cuir sous la neige, le duel de magie auquel Lukas l’avait soumis l’avait convaincu qu’il avait tout intérêt à plier le genou rapidement. La discussion qui s’ensuivit le convainquit ardemment qu’il devait suivre cet homme. Quant à ce qui a pu être dit pour faire naître en Murray pareille loyauté… c’est un mystère. Comme les Rainforth en ont le secret, après tout.

C’est à l’âge de vingt-deux ans, à la suite d’actes à faire frémir les Langues-de-Plomb, que Lukas réinvestit publiquement son manoir, ainsi que le nom de Rainforth. Ce qu’étaient devenus Rosalynd et ses héritiers, personne ne le sut jamais. Ceux qui étaient en mesure d’en parler ne tombaient d’accord que sur un point : où qu’ils fussent envoyés, ils n’en revinrent jamais.
A nouveau à la tête de la lignée qu’il savait affaiblie, Lukas reprit le flambeau de son père, et de ses ancêtres, et consacra chaque jour de sa vie à perpétuer les travaux séculaires de sa famille. Il fallut quelques années pour recouvrer la confiance du Ministère, et beaucoup d’efforts seraient encore à faire pour redorer le blason familial, qui ne le serait que lorsque chacun chuchoterait, avec inquiétude la question suivante : que fait-on vraiment, au Manoir Rainforth ?

Les valeurs de Magnus, autrefois rebutantes, sont aujourd’hui ce qui porte Lukas. Tout comme, mais c’est là un secret encore mieux gardé que l’existence du monde magique, l’idée d’un jour s’unir à celle qui d’un regard, autrefois, l’a convaincu qu’elle serait un jour sa femme.